Journal d’Agriculture Pratique
1860 Tome 11 Juillet à Décembre
Pages 235 - 236
A M Le Directeur du Journal d’Agriculture Pratique.
Monsieur,
Je lis dans le numéro du 5 Septembre (Page 209) de votre excellent journal, au résumé des travaux de la Société impériale et centrale d’agriculture de France, article des concours régionaux, une description inexacte de la race ovine Bretonne. Cette description est la répétition d’une partie de celle qui à été publiée par le Journal d’Agriculture pratique, dans le comte rendu du concours régional de Vannes (numéro du 20 mai, page 461) ; je crois devoir vous prier de la rectifier.
La race ovine Bretonne, dans sa pureté, est de petite taille : souvent même chétive, malgré sa rusticité et sa sobriété, faute de soins et de nourriture suffisante. La laine n’est pas fine ; mais elle est plutôt courte et frisée que longue, et se vend assez bien pour certains usages. Le plus ordinairement nos moutons sont blancs. Cependant il s’en trouve un bon nombre dont la couleur varie de brun clair au noir foncé. Quelques-uns sont gris ; ceux-là ont ordinairement la laine dure et longue et ressemblant à du crin. Nos fermières emploient la laine noire pour faire des bas, la brune et la grise servent pour la fabrication de certaines étoffes communes connus dans le pays sous le nom de berlinge, espèce de bure laine et fil. La chair de nos moutons est d’un goût délicat quand ils sont bien nourris : surtout celle de ceux qui viennent sur nos falaises et sur nos dunes. Quand ils sont mal nourris, ce qui est le cas le plus ordinaire, leur chair est dure et coriace. Celles des béliers et des vielles brebis a toujours ces défauts. Il est excessivement rare que des brebis de cette race donnent deux agneaux, comme le font celles de la race de deux qui existe dans les environs de Vannes. Il peut se faire que les troupeaux soient rares autour du chef-lieu du Morbihan : mais il y a dans ce département et dans tout le reste de la Bretagne plusieurs cantons où les troupeaux de cinquante à soixante têtes sont très communs. La race que l’auteur du compte rendu des concours de Vannes a vue et qu’il a pris pour la race bretonne est le produit du croisements plus ou moins mal entendus de la race mérinos avec la race bretonne. On trouve dans toute la Bretagne les moutons élevés avec les vaches et qu’on appelle pour cela moutons à vaches. Les moutons provenant de croisements de diverses espèces sont excessivement varies : mais ils vivraient fort mal s’ils n’avaient que le pâturage. Nos moutons de troupeaux, qui constituent la vraie race du pays, supportent parfaitement les intempéries de notre climat et se contentent de la nourriture frugale qu’ils trouvent dans nos pâturages. Cette race a subi peu d’améliorations ; cependant chez quelques fermiers intelligents qui l’ont croisée avec des béliers de race southdown, on a obtenu d’excellents résultats, tant sous le rapport de la laine que sous celui de la viande. Nos moutons bretons produisent environ un kil. de laine lavée à froid. Frais tonus et maigres ils valent de huit à douze francs pièce ; gras ils se vendent de quinze à vingt quatre francs. Chez nous les moutons de troupeaux n’ont que le pâturage et en hiver un peu de paille. On les engraisse sur les chaumes des céréales, on ne sait pas ce que c’est que d’engraisser les moutons à l’étable ; aussi la boucherie n’en trouve que dans certaine saison.
Veuillez agréer, monsieur le Directeur etc.
J L BAHIER
Agriculteur et expert à St Brieuc
et 1992
http://lprdad.fao.org/cgi-bin/getblob.cgi?sid=9fdf8d343a199f34dcdfb6fe239e3f15,50005995
Le mouton d’Ouessant est bien connu, en raison notamment de sa petite taille. Son nom est
d’apparition récente (moins de 50 ans) : auparavant, on connaissait le “Mouton breton”, qui
comprenait trois variétés et de nombreux types intermédiaires. Le plus commun était le “Mouton
des Landes de Bretagne”, qui semble avoir présenté des similitudes avec les moutons autochtones
ayant peuplé toute la moitié nord de la France. La “Race de deux” doit son nom à sa prolificité,
obtenue par croisement du Mouton des Landes de Bretagne avec la Flamande à la fin du l8ème
siècle. Les plus petits animaux ont été regroupés beaucoup plus tard sous l’appellation “Ouessant”.
Contrairement à l’opinion courante, le “Mouton des Landes de Bretagne” et la “Race de deux”
n’ont pas disparu mais subsistent avec des effectifs très faibles. Les principales caractéristiques
des trois variétés sont sommairement présentées et leur intérêt, souligné.